Stoul/Boogie Woogie Sister n°3 (détail) - Alesko/Octotrap (détail)

mercredi 26 mai 2010

Au voleur !!!!


Si vous suivez de près l’actualité artistique, le vol de 5 toiles de Modigliani, Braque, Picasso, Léger et Matisse, ne vous a certainement pas échappé. Le lendemain du larcin (estimé tout de même a 500 millions d’euros), l’adjoint à la culture, Christophe Girard parlait de vol d’une « sophistication extrême », avant que l’on apprenne que le voleur avait simplement cassé une vitre et brisé un cadenas…non vous ne rêvez pas une cisaille et un cutter sont des objets hautement sophistiqués, fruits du dernier cri de la technologie qui feraient passer l’IPad pour une charrue à soc.

Au-delà, des défaillances du système de sécurité, on ne peut s’empêcher de pointer du doigt l’assurance des conservateurs qui partent du principe que même si certaines des toiles exposées seraient dérobées, elles seraient de toute façon invendables. Ce qui est vrai puisque les toiles volées ne sont pas des œuvres de petits maîtres, et sont désormais identifiées et répertoriées sur un fichier mis en place par Interpol en 2009 qui recense 34000 œuvres dérobées à travers le monde.

Le hic est qu’il ne s’agit pas d’une première, les exemples sont nombreux : un Magritte volé en plein jour à Bruxelles en septembre 2009, un carnet de dessins au musée Picasso à Paris en juin de la même année et plus récemment un pastel de Degas à Marseille en janvier dernier et j’en passe. Ceci est assez symptomatique des manquements en matière de sécurité de la part des musées européens. Sont-ils pour autant les seuls responsables ? Dans le cas du Musée d’Art Moderne de la Ville de Paris, il semblerait que le système de sécurité ait été hors service depuis Mars, tuyau intéressant pour une personne mal intentionnée…De plus, par manque de moyens la plupart des Musées publics doivent faire appel à des sociétés de surveillance privées dont l’absentéisme et le laxisme sont pointés du doigt par les musées en question prompts à chercher un responsable ailleurs que dans leurs murs.

D’ici là, y a plus qu’à attendre le montant de la rançon, sûrement faramineux…autant vous dire que si vous voulez revoir ces œuvres un jour accrochées aux cimaises du MAM, va bien falloir que quelqu’un se dévoue pour mettre quelques euros dans le nourrain…d’ailleurs nous allons passer parmi vous.

lundi 17 mai 2010

Pourquoi tant de haine ?

Si vous avez une âme de théoricien de l'art, je vous recommande le bouquin de Jean-Louis Harouel, La Grande FalsificationL'art contemporain, Ed Jean-Cyrille Godefroy que je viens de terminer récemment. Outre le fait qu'il rejoint plus ou moins en des termes plus philosophiques voire abscons le propos de ce modeste blog, sa vision est juste bien que parfois un peu trop tranchée.
Il situe la dérive de l'art à l'apparition de la photographie, coupable d'après lui d'avoir volé le monopole de la représentation dont bénéficiaient les artistes depuis toujours.
Dans le viseur également: les intégristes de l'art contemporain qui vouent une adoration aveugle à tout ce qui est exposé au Centre Pompidou ou au Palais de Tokyo ne laissent aucune place à ceux et celles qui font de l'art sans espoir d'accéder à une quelconque reconnaissance de la part des institutions. Il dénonce à juste titre les dévots (entendez par là ceux qui sacralisent l'artiste et l'art contemporain) dépourvus de sens critique participant à cette vaste supercherie. « L'art laisse la place à l'enflure du petit moi du soi-disant artiste, tout empli de la croyance en son prétendu génie », génie alimenté par lesdits dévots ainsi que par son propre narcissisme. Certes, Duchamp (mais si vous savez le planqué de la guerre de 14 qui préféra exposer une pissotière à New York plutôt que d'aller charcuter du Teuton dans la boue des tranchées) et Dada sont responsables de cette petite mort mais pas autant que ceux qui les encensent et les exposent.
Ce qui en revanche pose problème dans cet essai d'Harouel, est le fondement sur lequel il se base pour décréter qu'une œuvre est bien ou mal peinte, ou qu'un artiste est bon ou mauvais. La notion d'œuvre d'art pour lui semble s'arrêter au pré-impressionnisme voire en extrême limite à Picabia (exception faite de Lucian Freud) d'après des critères qui lui sont propres en éludant toute définition.
L'analyse d'Harouel est dure, fervent partisan du « c'était mieux avant », soutenant que la mission de l'artiste doit se limiter à « représenter le visible ». Au final, il dénonce les dogmes de l'art contemporain pour imposer les siens, les notions de bon et de vrai artiste et leurs opposés sont une constante dans cet essai qui vaut cependant la peine d'être lu par tout professionnel ou amateur éclairé de l'art au sens large.

mercredi 12 mai 2010

Quand je pense à Fernando...

Si vous avez acheté le hors série annuel du Figaro consacré au marché de l'art édité en partenariat avec Beaux Arts magazine, vous pourrez avoir un aperçu des grandes tendances du marché de l'art de l'année écoulée. Bien entendu, il s'agit du Figaro : ce hors-série s'adresse non pas à l'amateur démuni mais davantage au collectionneur averti et très muni. On peut ainsi découvrir les (ouvrez les guillemets avec des gants blancs svp) : « occasions à saisir », au rang desquelles figure une toile de Fernando Botero, Fille de Cirque, bradée à 280000 euros...c'est vrai qu'au prix d'un studio à Saint Germain des Prés ou d'une villa de 250 m² dans le Larzac, on peut s'acheter un Botero. A ce tarif là, il faudrait vraiment être le dernier des abrutis pour passer à côté d'une telle affaire, au prix de 23 années de salaire d'un smicard, vous pouvez même mettre votre Ferrari au clou les yeux fermés.

Le pire est que cet encart tombera probablement entre les mains d'un collectionneur, ou plutôt d'un spéculateur qui déléguera à son expert* ou à sa décoratrice d'intérieur le soin d'acquérir l'oeuvre.

Pour ceux qui se risqueraient à spéculer sur l'art, le hors-série du Figaro est trompeur, pour 99.9% des personnes qui acquièrent une oeuvre d'art quel que soit son prix, la motivation première est le plaisir esthétique.

Evidemment, si le Figaro ne parlait pas de pognon, il perdrait sa raison de vivre, mais la notion d'occasion à saisir a quelque chose de dérangeant. Le marché de l'art n'est pas celui de l'immobilier, le spéculateur ou plutôt l'expert du spéculateur y fait certes aussi la pluie et le beau temps du moins en ce qui concerne la cote des artistes (hélas), mais en revanche la spéculation n'est qu'une infime partie du marché réservée a quelques happy few finalement bien mal conseillés, puisque s'il est un domaine volatile et aléatoire en matière d'investissement c'est bien l'art contemporain.

* le titre d'expert en art en France n'est réglementé par aucune loi ni conditionné par aucun diplôme, dès lors n'importe qui peut apposer une plaque à côté de sa porte en s'autoproclamant expert en art contemporain, en montres, en étiquettes de camembert, ou en porte-clés.